L'intelligence artificielle, trop de dépenses, pas assez de bénéfices ?
C'est le titre du dernier rapport de Goldman Sachs sur le sujet, qui cherche à répondre à la question que nous nous posons tous ; est-ce que l'intelligence artificielle est une bulle ?
Le rapport cherche finalement à interroger les sceptiques de l'intelligence artificielle, et ils ne sont pas nombreux.
Commençons par Daron Acemoglu, professeur au MIT.
Daron estime que seulement 25 % des taches exposées à l'IA seront rentables à automatiser dans les 10 prochaines années, ce qui signifie que l'IA affectera moins de 5 % des tâches totales.
Daron a récemment réalisé un papier sur l'impact de l'intelligence artificielle, où il explique que les gains en productivité des USA liés à l'IA seront bien plus limités que ce que prévoient les économistes.
Il s'attend à une augmentation de 0,5% de la productivité et d'1% du PIB durant les 10 prochaines années.
Les économistes de Goldman Sachs penchent plutôt sur un gain de 9% de la productivité, et de 6,1% du PIB.
Mais alors, pourquoi ce manque d'optimisme ?
Le constat de Daron est le suivant : l'IA va avoir un impact certains sur l'humanité, et va changer fondamentalement plusieurs processus.
Mais, ces changements prendront du temps à arriver, la narrative est réelle, la temporalité l'est moins.
Et surtout, selon lui, l'IA aura toujours des lacunes au niveau des tâches les plus complexes.
Elle peut évidemment être pertinente beaucoup de cas, mais elle aura toujours des lacunes, et le besoin d'être piloté par des humains.
Il déclare qu'une partie des investissements actuels dans l'IA sera tout simplement gaspillée ; certains projets échoueront, certaines entreprises seront trop optimistes dans le gain de productivité que l'IA va réellement leur apporter.
Car oui, c'est une réalité qu'il ne faut pas oublier ; les entreprises déboursent des centaines de milliards dans l'intelligence artificielle, dans le but d'avoir un retour sur investissement.
Et il va falloir un retour sur investissement conséquent.
Passons désormais à Jim Covello, responsable de la recherche sur les actions chez Goldman Sachs.
Il rejoint Daron sur le fait que pour obtenir un rendement sur l'IA, qui coûte une fortune, l'IA doit être en capacité de résoudre des problèmes complexes. Chose dont elle n'est pas capable actuellement, et peut-être même qu'elle ne le sera jamais...
Il revient sur ses estimations, et explique un fait très intéressant :
"Nous estimons que le déploiement de l’infrastructure de l’IA coûtera plus de 1 000 milliards de dollars au cours des prochaines années seulement, ce qui comprend les dépenses consacrées aux datacenters, aux services publics et aux applications. La question cruciale est donc la suivante : quel problème de 1 000 milliards de dollars l’IA résoudra-t-elle ?
Remplacer des emplois à bas salaires par une technologie extrêmement coûteuse est fondamentalement l’exact opposé des transitions technologiques précédentes".
Par exemple, Internet était une solution technologique moins chère que certaines solutions en place.
Amazon a battu les librairies, car il n'avait pas besoin d'entretenir des magasins physiques.
L'IA demande des infrastructures extrêmement coûteuses, ce qui questionne sa pertinence dans de nombreux secteurs.
D'autant plus que NVIDIA a un monopole sur les puces nécessaires à l'intelligence artificielle.
Même si cette situation venait à changer, cela ne serait pas pour bientôt tant NVIDIA a de l'avance sur son cœur de métier.
Mais, ces investissements faramineux dans l'intelligence artificielle ne s'arrêteront pas, et pour cause : la pression concurentielle est au maximum, et les investisseurs ne sont convaincus que par les entreprises liées à l'intelligence artificielle.
Depuis son revirement du métaverse vers l'intelligence artificielle, l'entreprise META se porte bien mieux.
Imaginez si une entreprise telle que Amazon, Google, Apple où même Microsoft disait "nous nous retirerons de la course à l'IA, cela ne sera pas rentable".
L'entreprise serait immédiatement sanctionnée et vendue.
Ainsi Jim Covello soutient que malgré son scepticisme, l'investissement dans les entreprises liées à l'IA est toujours pertinent.
Par ordre de priorité : NVIDIA, les services publics, et les entreprises exposés au développement nécessaire du réseau électrique.
Jim conclu avec ces mots, qui me semblent très justes :
"Construire à outrance des choses dont le monde n’a pas besoin ou n’est pas prêt à se lancer finit généralement mal. Si l'IA finit par avoir moins de cas d’utilisation et une adoption plus faible que ce que le consensus prévoit actuellement, il est difficile d’imaginer que cela ne posera pas de problème pour de nombreuses entreprises qui dépensent aujourd’hui dans cette technologie"