La Chine perd la guerre des semi-conducteurs
Les semi-conducteurs occupent une position centrale dans les technologies modernes, étant indispensables pour alimenter une vaste gamme d'applications, des smartphones aux systèmes de défense militaire.
Les semi-conducteurs occupent une position centrale dans les technologies modernes, étant indispensables pour alimenter une vaste gamme d'applications, des smartphones aux systèmes de défense militaire. En Chine, cette industrie est désormais érigée en priorité nationale, perçue comme un pilier stratégique pour garantir l'indépendance technologique du pays. Cette démarche vise à réduire la dépendance vis-à-vis des fournisseurs étrangers, particulièrement dans un contexte de sanctions et de tensions croissantes avec les États-Unis, qui accentuent la compétition pour la suprématie technologique mondiale.
Quelles sont les ambitions de la Chine dans ce secteur ? Comment gère-t-elle les sanctions étrangères ? QComment la Chine compte-elle rattraper son retard ? C'est ce que nous allons découvrir dans l'allongé du jour.
💡 Conquérir l’industrie des semi-conducteurs
La Chine a longtemps rêvé de devenir autonome dans la production de semi-conducteurs. Xi Jinping a lancé des plans ambitieux pour réduire la dépendance du pays vis-à-vis des technologies américaines et a investi des milliards de dollars pour soutenir les industries locales. Le gouvernement chinois a fixé un objectif : atteindre 70% d’autosuffisance dans les semi-conducteurs d’ici 2025. Cependant, à ce jour, la Chine est encore loin de cet objectif avec seulement 30% de production locale réalisée en 2023.
Cependant, le pays a bien évolué sur ce sujet durant la décennie 2012 - 2022, avec une augmentation de 365% du nombre de wafers (les tranches de silicium sur lesquelles les puces sont fabriquées) qu'elle peut traiter par mois. À titre de comparaison, durant cette même période, l'augmentation aux États-Unis n'a été que de... 11%.
Les États-Unis ont compris cette erreur, dans une période où l'intelligence artificielle et la réindustrialisation sont devenues des sujets prépondérants pour les décennies à venir. Ils prévoient d'augmenter leur capacité de production de wafers de 203% durant la décennie 2022 - 2032.
🚧 Sanctions et dépendance étrangère
Le principal problème est que la fabrication de semi-conducteurs, en particulier les puces avancées, nécessite des équipements et une expertise que la Chine peine encore à maîtriser. Et il faut dire que les sanctions n'aident pas : la Chine n'a pas accès aux machines Extreme Ultra Violet d'ASML, les plus avancées.
Pourquoi ? Car Joe Biden conclu un accord avec les Pays-Bas et le Japon pour restreindre les exportations de certaines machines de pointe pour la fabrication de puces vers la Chine.
La Chine n'a donc accès qu'à la technologie Deep Ultra Violet, n'ayant pas accès à la lithographie Extreme Ultra Violet de la firme ASML. Ainsi, les gravures sur les puces en Chine sont plus longues, mais elles ont également un taux d'échec plus élevé. De plus, elles ne peuvent pas réaliser des gravures aussi fines que les machines Extreme Ultra Violet.
Résultat : la Chine ne peut graver qu'en 7 nanomètres, pendant que les puces occidentales, comme les dernières puces A16 d'Apple, sont gravées en 4 nanomètres.
🇨🇳 La réponse chinoise
Ces restrictions touchent non seulement les semi-conducteurs, mais également les équipements nécessaires à leur fabrication. En réponse, la Chine a lancé des contre-mesures, notamment des contrôles sur l’exportation de matériaux clés comme le germanium et le gallium, utilisés dans la production de puces avancées.
Cependant, ces efforts n’ont pas été suffisants pour combler l’écart technologique. Les entreprises chinoises continuent de dépendre des technologies étrangères, et les restrictions occidentales ont non seulement ralenti leur avancée, mais également perturbé leurs chaînes d’approvisionnement. Par exemple, Huawei, autrefois leader dans la production de puces avancées, a vu sa capacité de production considérablement réduite à cause des sanctions américaines.
"Désormais privé des services de TSMC, Huawei a été contraint de produire des puces de qualité inférieure dans des fonderies chinoises incapables de fabriquer des puces plus avancées. En réponse à mes questions, l'entreprise n'a pas commenté les spécificités de ses activités dans le domaine des puces, mais a reconnu que « nous avons encore de sérieux défis à relever » et a noté que « les restrictions technologiques et les barrières commerciales continuent d'avoir un impact sur le monde»".
The Atlantist 🔗
🛠 Investir dans l’innovation locale
Face aux sanctions, la Chine a intensifié ses efforts pour développer des alternatives locales. Des entreprises comme SMIC travaillent pour développer des équipements domestiques capables de rivaliser avec les technologies occidentales. Cependant, ces efforts sont loin de combler l’écart. La production de puces avancées nécessite une synergie parfaite entre machines, matériaux et expertise, et la Chine n'a pas encore toutes les clés pour y parvenir.
En parallèle, la Chine investit massivement dans des secteurs connexes tels que la fabrication de puces bas de gamme pour maintenir une forme d’autosuffisance. En 2023, le pays représentait un tiers des ventes mondiales d’équipements de production de semi-conducteurs, un signe que les investissements internes commencent à porter leurs fruits bien que dans des technologies moins avancées.
Le gouvernement a également mis en place des fonds dédiés au développement de cette industrie, dont le plus récent a levé près de 48 milliards de dollars. Bien que ces initiatives montrent une volonté de s’adapter, elles soulignent également la complexité de rattraper le retard technologique et de faire face aux sanctions occidentales.